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Chine : le miracle économique n’est guère « nature-friendly »

Article du 01/08/2007
DOSSIER

En Chine, les perspectives d’une croissance à deux chiffres importent plus que la protection de l’environnement. Pour autant, Pékin s’est faite faire rappeler à l’ordre par l’OCDE et le manque d’intérêt pour l’environnement pourrait à terme nuire au développement chinois. Le serpent se mord la queue.

La troisième puissance économique mondiale

Le miracle de l’économie chinoise pourrait faire rêver. Le PIB chinois a crû de 11,1 % sur un an au premier trimestre 2007, selon le rapport du Bureau national de la statistique. Et la Chine pourrait bien détrôner l’Allemagne (PIB de 2 900 milliards de dollars fin 2006) comme troisième économie mondiale à la fin de l’année.
Pékin accumule les années de croissance du PIB à deux chiffres (11,1 %, pour 2006, soit un produit intérieur brut de 21 087,1 milliards de yuans) et, malgré les récentes prises de conscience qu’une croissance trop forte et déséquilibrée - balance des paiements déséquilibrée, liquidités excessives, dépendances vis-à-vis des partenaires commerciaux, taux d’épargne le plus élevé au monde, dépenses sociales mal réparties - comporte des risques, les autorités ne cachent pas leur fierté.
Si Pékin a donc récemment prôné des mesures pour éviter la surchauffe, aucun secteur de l’économie chinoise n’a vraiment ralenti. Et, en conséquence, les risques de crise financière se multiplient.
Pékin a déjà pris toute une série de décisions cette année pour freiner la machine : hausses des taux d’intérêt, des taux de réserves obligatoires des banques et mesures fiscales pour tenter de freiner ses exportations.
Lesquelles ne sont pas sans provoquer des frictions avec ses deux principaux partenaires commerciaux, les Etats-Unis et l’Union européenne. La Chine reste bel et bien « l’atelier du monde », forte d’un excédent commercial record en juin (environ 20 milliards d’euros).
Washington et Bruxelles n’en finissent pas d’accuser Pékin de maintenir le yuan sous-évalué, ce qui revient à subventionner illégalement les produits chinois à l'étranger.
D’un côté, la sous-évaluation du yuan est depuis de longs mois la raison du déficit commercial américain. De l’autre, cette situation est à l’origine du gigantesque excédent de la Chine.
Pékin observe de près les fluctuations de sa monnaie car les autorités refusent de voir le cours du Yuan s’apprécier fortement par rapport au Dollar, comme il devrait le faire compte tenu du contexte économique, et affirment qu’une réévaluation trop brutale aurait de graves conséquences, notamment sociales.
Pour autant, ce statu quo semble difficile à tenir à long terme. Premier risque : celui d’une bulle et d’une contagion aux autres monnaies de la région. Et à terme « un atterrissage brutal de l’économie chinoise », prévient le Trésor américain.

… en passe de devenir la plus polluante

Cette croissance à tous crins, outre ses dangers financiers, économiques et sociaux, comporte des risques environnementaux dont les premières traces sont déjà visibles.
Un exemple parmi tant d’autres. Dans certaines provinces chinoises, le désert gagne en effet du terrain à mesure que les régions se développent. L’abandon des métiers de la terre par les habitants des régions les plus reculées, qui tentent leur chance dans les grandes villes côtières, a parfois complètement modifié le paysage. Inversement, dans certaines contrées, c’est la surexploitation agricole qui modifie la topographie des lieux. Les nouvelles cultures sont souvent plus gourmandes en eau que les cultures traditionnelles et en pompant à outrance dans les nappes phréatiques, ces dernières quasi-vides, ne jouent plus leur rôle naturel. En surface, c’est tout la flore qui en pâtit voire disparaît, entraînant ainsi le déplacement de la faune. Les rivières se tarissent. Les tempêtes de sable ont été multipliées par six depuis un demi-siècle. La poussière provenant de Chine a même été liée à des problèmes respiratoires... en Californie.
La pollution de l’air et de l’eau en Chine pourrait être à l’origine de 750 000 décès prématurés par an selon la Banque Mondiale. Ce que nie Pékin qui a fait barrage à la publication de l’étude de l’organisation internationale.
Pour enrayer la désertification dans le nord-ouest du pays, des villages délaissés par leurs habitants devraient être rasés et remplacés par des plants d’herbe censés faire barrage à l’avancée du sable des déserts de Tengger et Badain Jaran.
Le désert couvre aujourd’hui un tiers de la Chine. Or le pays ne possède que 7 % des terres arables mondiales pour nourrir plus de 20 % de la population de la planète. Leur préservation est donc un enjeu de santé publique prioritaire si l’on ne veut pas voir réapparaître le spectre de la grande famine de l’époque du Grand Bond en avant de Mao Zedong (tentative infructueuse de modernisation de l’agriculture chinoise) qui avait causé la mort de 20 à 30 millions de paysans à la fin des années 1950.
La facture de la désertification s’élève à sept milliards de dollars en pertes économiques annuelles. Et la note pourrait être beaucoup plus lourde si ce phénomène n’est pas enrayé.
Autre facteur économique qui pèse sur l’environnement. L’accession de plus en plus nombreuse des Chinois à la voiture – « une nouvelle voiture est vendue toute les quatre à six secondes en Chine », notait récemment Noé Van Hulst, directeur des analyses politiques de long terme de l’Agence internationale de l’énergie – explique en partie l’augmentation des rejets de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère.
En 2006, les émissions chinoises de dioxyde de carbone ont dépassé celles des Etats-Unis, jusqu’alors le plus gros pollueur de la planète. La Chine pourrait même devenir le premier émetteur de GES au monde avant 2009, selon l’AIEA.
La Chine est aussi le premier producteur et surtout premier consommateur mondial de charbon, l’une des sources d’énergie les plus polluantes, qui alimente près de 70 % de ses besoins énergétiques.

De quoi saper les bases de son développement

Face à ces constats, il faut en outre noter que le géant asiatique n’a pas d’obligation de réduction des émissions polluantes. Ce que déplore vivement l’OCDE, qui vient d’émettre un rapport à ce sujet.
Ses conclusions : certaines villes chinoises sont « parmi les pires du monde » en termes de pollution de l’air ; environ un tiers des cours d’eau sont « gravement pollués » ; la gestion des déchets, la protection de la nature et la préservation de la biodiversité continuent de poser des problèmes.
D’ici 2010, selon les prévisions du vice-ministre chinois de la Construction, la moitié des Chinois vivront en ville. Une tendance encore accrue par un mouvement profond d’exode rural des travailleurs chinois. Ainsi, 13 millions de personnes s’exilent dans les villes chaque année et à Shanghai, le tiers de la population est originaire d’autres régions. Ce sont ces « mingongs », ces exilés, qui sont à l’origine même du miracle chinois.
Et, au final note l’OCDE, ses catastrophiques environnementales pourraient bien amputer le développement économique chinois : « pour quadrupler le PIB entre 2000 et 2020 comme prévu, il faudra augmenter dans les mêmes proportions le financement de la gestion de l’environnement, faute de quoi la croissance ne saurait être écologiquement viable ».
Selon les dernières estimations disponibles – les plus récentes pourraient avoir été bloquées par les autorités –, les dégâts écologiques auraient coûté au pays quelques 3 % de son PIB en 2004. Et cela pourrait être bien plus en 2005.

Francebourse.com – Alexandra Voinchet, avec AFP
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