Alors que le G8 s’apprête à tenir réunion en Allemagne, à Heiligendamm, du 6 au 8 juin prochains, les anti-mondialistes élèvent la voix.
Samedi, une manifestation a dégénéré à Rostock donnant lieu à de violents affrontements entre la police allemande et des dizaine de casseurs, armés de pavés et de bouteilles. Plusieurs centaines de personnes (430 policiers dont 35 sérieusement et 520 manifestants) auraient été blessés. Il s’est agi des plus graves incidents de rue observés depuis des années en Allemagne.
Ces échauffourées ont été condamnées par les organisateurs des manifestations altermondialistes. En 2001, le sommet du G8 à Gênes avait également donné lieu à des violences urbaines fortes : un manifestant avait été tué par la police.
Par crainte de nouveaux accrochages, les mesures de sécurité avant l’ouverture du sommet ont été renforcées dans ce port de la Baltique. 16 000 policiers seront mobilisés durant le sommet. Une clôture de 12 km a été mise en place autour du village d’Heiligendamm proprement dit pour tenir manifestants et activistes à l’écart des dirigeants du G8. Par la mer, tout accès non autorisé est également impossible, grâce à un filet flottant.
Des tensions palpables également parmi les membres du G8
Cette tension sera sans doute également présente autour de la table des discussions et ce sur plusieurs sujets.
Le premier : le climat. Le réchauffement climatique a opposé ces jours derniers les États-Unis à la chancelière Angela Merkel, hôte de ce sommet, qui a fait de ce dossier une priorité. Pourtant les choses semblent se décanter. Le Premier ministre britannique Tony Blair a même estimé qu’une « percée historique » était possible en matière de protection climatique.
Il semblerait en effet que les Etats-Unis soient plus ouverts au dialogue à ce sujet. George Bush a en effet proposé jeudi un nouveau cycle de négociations avec les 15 grandes économies mondiales pour fixer d’ici à fin 2008 un objectif mondial à long terme de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de lutte contre le réchauffement climatique.
Une avancée quand on sait que les Etats-Unis, responsables d’un tiers des émissions, ont refusé de ratifier le protocole de Kyoto qui prévoit une réduction des gaz à effet de serre et qui expire en 2012.
Les pays du G8 génèrent à eux seuls plus de 40 % de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre.
Reste qu’Angela Merkel ne conçoit aucune action en dehors du cadre onusien. « Les initiatives américaines sur la protection du climat sont tout à fait bienvenues de notre part à condition qu’elles s'inscrivent dans le cadre du programme de l’ONU », a-t-elle souligné lors d’une conférence de presse.
Tony Blair devrait aussi mener les discussions concernant l’Afrique dans le prolongement du précédent sommet de Gleneagles (Ecosse) en 2005. De retour d’une tournée diplomatique su ce continent, le Premier ministre britannique entend bien lancer de nouvelles initiatives pour lutter contre la pauvreté, la maladie et en faveur de la paix, à quelques jours de la fin de son mandat national.
Entre les Etats-Unis et la Russie, la question du bouclier antimissile que les Américains souhaitent installer en Europe de l’Est ne saurait être facile à trancher. Et toute nouvelle course à l’armement favorable. Car, face à la décision américaine, Vladimir Poutine n’a pas attendu le sommet du G8 pour répliquer. Ce matin, il prévient que la Russie prendra « des mesures de rétorsion » si Washington développe son projet de mise en place d’un bouclier anti-missile. « Nous déclinons toute responsabilité pour nos mesures de rétorsion, parce que ce n’est pas nous qui sommes les instigateurs de la nouvelle course à l’armement, qui se trame indubitablement en Europe ». « L’équilibre stratégique dans le monde est perturbé et afin de rétablir cet équilibre sans créer de défense anti-missile sur notre territoire, explique le Chef d’Etat russe, nous créerons un système à même de contrer ce système anti-missile. C’est ce que nous faisons à l’heure actuelle. »
Avec Moscou, le différend à propos du statut du Kosovo promet également des discussions houleuses.
Une première pour le Président Sarkozy
Nicolas Sarkozy fera là ces premiers pas sur la scène diplomatique internationale. Et rencontrera pour la première fois depuis son élection Georges Bush.
Les deux hommes devraient s’entretenir sur la question du réchauffement de la planète. « Je veux leur dire aussi [à nos amis américains"> que l’amitié c’est accepter que ses amis puissent penser différemment, et qu’une grande nation comme les Etats-Unis a le devoir de ne pas faire obstacle à la lutte contre le réchauffement climatique, mais au contraire d’en prendre la tête parce que ce qui est en jeu c’est le sort de l’humanité tout entière », déclarait le nouveau Président le 6 mai au soir.
Quid du G8 ?
Le sommet de Heilingendam réunira les pays les plus industrialisés : Allemagne, Etats-Unis, Russie, France, Grande-Bretagne, Italie, Canada, Japon. « Le poids économique de ses membres représente 63 % du PNB mondial, et environ 50 % du commerce international de marchandises, explique Valéry Giscard d’Estaing dans une tribune du journal Les Echos ce matin. Ils fournissent environ les trois quarts de l'aide au développement. »
Le G8 est né du rassemblement des six premières puissances mondiales en 1975 sur l’initiative du président Valéry Giscard d’Estaing.
Toutefois, la représentativité du G8 est remise en question la puissance grandissante de pays comme la Chine, l’Inde ou le Brésil qui n’en font pas partie.
De l’avis de l’ancien Président français, « cela ne servirait sans doute à rien d’ajouter de nouveaux membres, car la nature même de ses délibérations en serait altérée, mais c’est un argument de plus pour le faire revenir vers sa vocation d’origine : offrir aux chefs d’Etat et de gouvernement une enceinte de discussion et d’échange leur permettant d’approfondir la connaissance mutuelle de leurs points de vue et de dégager des espaces consensuels où conduire des actions communes. » Difficile pour l’heure de voir quels changements apporter à cette structure « mais, lorsque le PIB de la Chine et celui de l’Inde auront dépassé les niveaux de tous les membres du G8, à l’exception des Etats-Unis et peut-être du Japon, ce qui ne saurait beaucoup tarder, il sera bon de rechercher une forme plus adaptée de gouvernance économique mondiale », écrit Valéry Giscard d’Estaing.
