Pour la première fois depuis sa nomination, Rachida Dati a accordé une interview au Monde. Les deux textes prioritaires de la nouvelle Garde des Sceaux, présentés en juillet, concernent les peines planchers et la suppression de l’excuse de minorité à 16 ans pour les délinquants récidivistes, deux promesses de campagne de Nicolas Sarkozy. Rachida Dati a précisé au Monde son projet de réforme de la justice pénale.
Rachida Dati s’est tout d’abord voulu rassurante vis-à-vis des juges. Leur liberté d’application ne sera pas remise en cause. En revanche, la garde des Sceaux prône une réforme de la loi pénale afin de la rendre « dissuasive ». Les peines planchers, « de l'ordre du tiers du maximum prévu pour l'infraction », qui s’appliqueront « aux crimes et aux délits punis de plus de trois ans d'emprisonnement, avec un régime plus sévère pour les violences graves, telles que les atteintes à l'intégrité physique ou les vols avec violence », a expliqué Rachida Dati. Ce projet s’appliquera aussi bien aux mineurs qu’aux majeurs. S’il y a récidive, le condamné écopera d’une peine minimale d’un an de prison si le délit est punissable de trois ans, de deux pour cinq ans, de trois ans pour sept ans et de quatre ans pour les délits punis de dix ans, a-t-elle précisé au Monde. Toutefois, le juge aura la possibilité de prononcer une peine inférieure s’il s’agit de la première récidive.
En ce qui concerne les mineurs de 16 à 18 ans, Rachida Dati a indiqué que « le principe de l'excuse de minorité demeure ». Mais plus dans tous les cas. En effet, en cas de « crimes portant atteinte aux personnes et des délits graves de violences ou agressions sexuelles », l’excuse de minorité sera écartée à la deuxième récidive.
Concernant la loi pénitentiaire annoncée pour l’automne, « une loi extrêmement importante », la garde des Sceaux a indiqué que la France devait « se conformer aux standards européens ». Son souhait : parvenir à un détenu par cellule. La réforme portera aussi sur « les conditions de travail du personnel pénitentiaire ». Rachida Dati a évoqué « une réflexion sur la création d'un contrôleur général indépendant des prisons, sur le modèle anglais ». Enfin, « la loi portera aussi sur la création d'hôpitaux-prisons pour les détenus atteints de troubles psychiatriques ».
Un autre chantier prioritaire de la nouvelle garde des Sceaux : « mettre en place une véritable gestion des ressources humaines de la magistrature ». « Je souhaite que les magistrats soient accompagnés tout au long de leur carrière, que leurs compétences soient mieux identifiées, que leur parcours soit mieux valorisé, en interne et en externe, qu'il y ait une meilleure adéquation entre compétences et fonctions », a-t-elle expliqué. « Les talents de la magistrature ne sont pas suffisamment reconnus à mes yeux, a estimé Rachida Dati dans Le Monde. Je souhaite également développer avec détermination une numérisation des dossiers judiciaires, pour améliorer l'efficacité de la justice. »
