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Cannes : la Palme d'or à Cristian Mungiu pour « 4 mois, 3 semaines et 2 jours »

Article du 28/05/2007
Clap de fin à Cannes. Hier soir, la Palme d’or a été décerné au réalisateur roumain Cristian Mungiu, 39 ans, pour son second long-métrage « 4 mois, 3 semaines et 2 jours ». Le film est une chronique saisissante des années Ceaucescu à travers le portrait de deux jeunes femmes solidaires dans l'accomplissement d'un avortement clandestin. Il raconte comment deux étudiantes, qui partagent une chambre dans une cité universitaire, organisent une rencontre avec un homme surnommé « Monsieur Bébé », pour un avortement clandestin dans une chambre d'hôtel, dans la Roumanie de 1987 où, contrairement au reste de l'Europe de l'Est, cela était interdit.
Le film est né d'une « expérience tellement personnelle qu'on ne la partage généralement pas avec les autres », a expliqué Cristian Mungiu, ajoutant: « lorsque je l'ai raconté à certaines personnes, il s'est avéré qu'ils avaient tous vécu une expérience similaire ». Un demi-million de femmes roumaines aurait perdu la vie en avortant sous le régime communiste. « A cause des pressions exercées par le régime, les femmes et les familles étaient si inquiètes de ne pas se faire prendre pour avortement illégal qu'elles ne consacraient pas une seule minute à se poser des questions morales », a indiqué le cinéaste, également scénariste et producteur.

Remarqué à Cannes

Cristian Mungiu est l'un des réalisateurs du mouvement « Post-décembre », une expression qui désigne l'après-chute du régime Ceaucescu en décembre 1989. Né en 1968 à Lasi, en Roumanie, Cristian Mungiu a étudié la littérature anglaise et américaine à l'université de Lasi, avant de se former à la réalisation cinématographique à l'école du film de Bucarest. Il a tout d’abord exercé comme professeur, puis comme journaliste de presse écrite, radio et télévisée jusqu'en 1994. Pendant ses études cinématographiques, Mungiu a travaillé comme assistant réalisateur sur des productions étrangères tournées en Roumanie, notamment « Capitaine Conan » de Bertrand Tavernier et « Train de vie » de Radu Milhaileanu. Une fois son diplôme en poche, il s’est lancé dans la réalisation de courts-métrages. Son premier long-métrage, « Occident », fut remarqué à la Quinzaine des réalisateurs, section parallèle du Festival de Cannes, en 2002. Cristian Mungiu a alors fondé sa société de production, Mobra Films en 2003. Il affiche tout de suite son goût pour les décors naturels et fuit les studios, affirmant « j'aime lorsque l'environnement raconte également son histoire », et privilégie les longs plans-séquences, pour obtenir une mise en scène fluide et naturelle.

Entre deux réalités

En recevant sa récompense hier à Cannes, le réalisateur roumain a confié : « Pour moi c'est un peu un conte de fées ». « J'espère que cette Palme d'or sera une bonne nouvelle pour les petits cinéastes des petits pays, car il semble enfin qu'on n'ait plus besoin de gros budgets et de grandes stars pour faire une histoire que tout le monde écoutera », a-t-il poursuivi. Avant d’annoncer le nom du vainqueur, Jane Fonda a résumé : « Le cinéma divertit mais le cinéma fait aussi réfléchir sur le monde. Et Cannes est un équilibre fragile entre ces deux réalités ».
Filmé de manière simple et sans artifice, sobre et sans sentimentalisme, « 4 mois, 3 semaines et 2 jours » se situe dans la droite ligne des films en prise avec la réalité, tels que « Rosetta » ou « L'enfant » des frères Dardenne, deux fois Palme d'or en 1999 et 2005.

Le Festival aime le cinéma roumain

Le 60e Festival de Cannes, présidé par le réalisateur britannique Stephen Frears, a ainsi délaissé les grands noms du cinéma, ignorant totalement des valeurs aussi confirmées qu’Emir Kusturica, Quentin Tarantino, Wong Kar-wai ou les frères Coen, alors que le film de ces derniers, « No country for old men », était souvent donné favori.
La Croisette fait la part belle au cinéma roumain. La veille, « California Dreamin », premier long métrage de Cristian Nemescu, 27 ans, décédé dans un accident de voiture peu après la fin du tournage, qui a remporté le prix de la section parallèle officielle Un Certain Regard.
L'an dernier, le film « 12h08 à l'est de Bucarest », de Cornéliu Porumboiu, avait gagné la Caméra d'or récompensant le meilleur premier long métrage. Il y a deux ans, un autre film roumain, « La mort de Monsieur Lazarescu », de Cristi Puiu, avait déjà remporté le prix d'Un Certain Regard.

Prix secondaires

Le Festival de Cannes a par ailleurs décerné ses prix d'interprétation à deux comédiens inconnus du grand public: le Russe Konstantin Lavronenko pour « Le bannissement » et la Sud-Coréenne Jeon Do-yeon pour « Secret Sunshine », deux films sombres évoquant le deuil et la mort.
Le Grand Prix, deuxième récompense par importance, est revenu au film « La forêt de Mogari », de la réalisatrice japonaise Naomi Kawase, histoire délicate et contemplative de deux personnages confrontés à un douloureux travail de deuil, une jeune aide-soignante et un pensionnaire d'hospice pour troisième âge.
Les autres favoris et chouchous des journalistes et spectateurs pendant ces douze jours de festival, films moins tristes et plus ouverts au grand public, ont obtenu des prix secondaires: le Prix du scénario pour « De l'autre côté », du Germano-Turc Fatih Akin; celui de la mise en scène pour « Le scaphandre et le papillon », film français réalisé par l'Américain Julian Schnabel; et celui du Jury pour le dessin animé « Persepolis » de l'Iranienne Marjane Satrapi et du Français Vincent Paronnaud, prix partagé avec « Lumière silencieuse » du Mexicain Carlos Reygadas.

Spécial anniversaire

Pour cette édition spéciale, le jury a ajouté au palmarès un « Prix du 60e anniversaire », remis à l'Américain Gus Van Sant « pour une carrière mais pour un très beau film aussi » (« Paranoid Park »), a indiqué Stephen Frears. L'un des grands oubliés du palmarès, qui avait séduit beaucoup de festivaliers, est « No Country For Old Men » des frères américains Joel et Ethan Coen.
Pour le divertissement, les invités de cette soirée de palmarès, présentée par l'actrice Diane Kruger, ont eu droit à la projection, en film de clôture, de la comédie « L'âge des ténèbres » du Canadien Denys Arcand.

Francebourse.com- Manuelle Tilly


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