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Economie : la météo joue sur l'économie

Article du 03/05/2007
« En avril, ne te découvre pas d’un fil. » Trop tard après ce mois d’avril particulièrement chaud. Pour l’heure, les Français profitent de la douceur du climat en cette fin de période de vacances de Pâques et espère conserver un temps aussi agréable pour les mois à venir.
Ce que confirme Météo France dans son dernier bulletin semestriel : « pour ce printemps, Météo-France prévoit des températures moyennes supérieures aux normales saisonnières ».
Mais une telle clémence météorologique n’est pas sans poser de lourdes questions sur le dérèglement climatique et le problème du réchauffement. Le souvenir de la canicule de 2003 et de ses milliers de morts est encore bien présent, tout comme celui de la tempête en 1999 ou plus loin de nos terres des effets dévastateurs du phénomène El Niño.
Mais au-delà des effets à long terme, la météo a également des incidences économiques plus proches de nous. La température reste le premier paramètre - et le plus fiable - qui préoccupe les professionnels de l’énergie, du tourisme ou encore de la grande distribution. Mais d’autres comme le vent ou la pluie pourraient influer sur les stratégiques économiques.

Des entreprises météo-sensibles

L’activité économique est donc bel et bien tributaire des conditions météorologiques.
En Bourse, les tenants des marchés ont inventé des produits dérivés « climatiques » pour se couvrir des aléas du temps. Car « le risque météo, même s'il ne touche pas directement à la sécurité des personnes et des biens, compte parfois plus dans la balance que le risque des taux d'intérêt ou des taux de change », note Météo France.
Ainsi, Météo France a mise au point avec Euronext, la première bourse pan-européenne, des indices climatiques qui serviront de sous-jacents à des contrats à terme standardisés.
Par exemple, « pour la plate-forme Euronext, Météo France calcule chaque jour les indices PowernextWeather, un indice national et 5 indices régionaux », peut-on lire sur son site.
« Quand on sait qu’environ 30 % du PIB d’un pays est directement impacté par la météo, on mesure mieux l’intérêt stratégique pour les entreprises d’anticiper ou de compenser les écarts climatiques », expliquait en 2005 pour L’Exapnsion Jean Carle, responsable à Météo France du développement des produits dérivés climatiques.
A titre d’exemple, Météo France note que près de 80 % de la variance de la consommation de bière est expliquée par le seul facteur climatique. « Un brasseur allemand peut ainsi tout à fait se couvrir contre un risque météorologique en achetant un put indexé sur l’indice Powernext Weather Allemagne. De sorte que si la température glisse en deçà d’un seuil prédéfini, ses pertes sont compensées par l’exercice de son option », expliquait le magazine L’Expansion à ce sujet en 2005. « Une variation de 1°C lorsque la température en août atteint 25°C entraîne une variation du chiffre d’affaires de 7,5%. Sachant que la volatilité de la température en août est voisine de 2°C, on peut affirmer que l’écart-type de la demande de bière sur la période s’établit à un niveau voisin de 15 % ».
Il en va de même pour les fabricants de glace ou de sodas…

Les électriciens regardent le baromètre

Selon une étude de Météo France et de RTE (Réseau de transport d’électricité), « les variations de températures entraînent l’utilisation du chauffage électrique en hiver ou de la climatisation en été. Lorsque la température baisse de 1°C en hiver ou en intersaison, la consommation française peut augmenter de 1600 MW (soit l’équivalent de la consommation de 1 600 000 habitants, ou deux fois la ville de Marseille). » Et inversement.
En janvier, André Merlin, le président de Réseau Transport d’Electricité (RTE), constatait que la consommation française d’électricité a baissé de « l’ordre d’1 % » en 2006 sur un an. Une bonne nouvelle certes pour l’environnement puisque « cela fait neuf ans que l’on n'avait pas connu une telle évolution de la consommation ».
Mais qui oblige les professionnels du secteur (producteurs d’électricité, centrales nucléaires) à revoir leur stratégie. Car l’énergie ne se stocke pas et les variations météorologiques obligent RTE à « ajuster en permanence et en temps réel la production d’électricité à la demande sur le réseau public ».
Si les températures poursuivaient leur pente ascendante, c’est le réseau global de fabrication d’électricité qui pourrait être corrigé au détriment peut-être des grosses structures, par essence plus difficiles à piloter sur des délais courts, et à la faveur de sources d’énergie plus petites et renouvelables (éolien, solaire, géothermie…)
Plus largement dans notre économie, le réchauffement climatique, s’il poursuit sa lancée, rendra nos infrastructures obsolètes, explique Stéphane Hallegatte, économiste et ingénieur à Météo-France. Un exemple parmi tant d’autres : « si un été conforme à la normale saisonnière en 2080 ressemble à celui de 2003, les habitations françaises devront être modifiées : meilleures isolation et conception si on s’y prend suffisamment tôt, climatisation généralisée si on n’anticipe pas ce besoin. La même chose vaut pour l’ensemble de nos infrastructures lourdes, comme la gestion des eaux, la protection contre les inondations, la production électrique, les infrastructures portuaires, etc. »

Hiver doux et manque de neige = l'économie des stations en danger

Premières à avoir pâti de la douceur des températures cet hiver, les stations de ski de basse et moyenne altitude, selon les études de Météo France. L’Organisation pour la coopération et le développement économique a à ce sujet tiré la sonnette d’alarme au début de l’année : « une hausse de la température de 1°C, de 2°C ou de 4°C à l’avenir pourrait ramener le nombre de domaines skiables jouissant d’un enneigement fiable à 500, 400 ou 200, respectivement. »
L’OCDE insiste particulièrement sur les changements climatiques qui se sont opérés ces dernières décennies. « Les Alpes sont particulièrement sensibles aux changements climatiques et le réchauffement récent y a été à près de trois fois supérieur à la moyenne mondiale. Les années 1994, 2000, 2002, et 2003 ont été les plus chaudes dans les Alpes au cours des cinq cents dernières années (d’après des reconstructions de haute résolution du climat de la région depuis 1500 après J.C.) », précise l’organisation. Les données des satellites de Météo France indiquent une réduction moyenne de la couverture de neige d’environ 10 % depuis 1960 sur les continents de l’hémisphère nord.
Au-delà de l’amoindrissement du manteau blanc, c’est bien toute l’économie saisonnière de des régions alpines qui est menacée. Ce n’est pas anecdotique : les épreuves de Coupe du monde féminine de Val-d'Isère ont dû être annulées ce mois-ci en raison du manque de neige, tout comme le slalom féminin de Megève, prévu le 20 décembre. Cet hiver, les canons à neige ont marché à plein régime quand le temps le permettait.
L’OCDE suggère d’autres pistes de réflexion : installer des revêtements en plastique pour protéger les glaciers d’une fonte trop rapide, « niveler les pentes et détourner les cours d’eau pour modifier le relief mettent l’environnement naturel en péril et accroissent les risques de crues soudaines et d’éboulements ». Autant de solutions qui ne sont pas neutres sur le plan environnemental comme économique.

Les piscines ont la cote depuis la canicule

Le dernier rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), à l’occasion de la réunion de Paris sur le climat, fait peser la menace à la fois sur l’environnement et sur l’homme en prévoyant une augmentation des températures dans une fourchette de 2 à 4,5 degrés au dessus des niveaux pré-industriels. Le thermomètre mondial a gagné 0,8 degrés depuis le début du 19e siècle. A titre de comparaison, la température actuelle moyenne de la planète est d’environ 5 degrés supérieure à celle de l’ère glaciaire qui s’est achevée il y a 10 000 ans.
Et ce ne sont pas les températures de l’été 2003 qui contrediront les tenants de la thèse du réchauffement global de la planète. La canicule d’août 2003 a été exceptionnelle par sa durée (près de deux semaines), son intensité et son extension géographique. L’été 2003 est le plus chaud jamais observé depuis 1950 avec des températures minimales de 25 °. Et des baromètres qui ont allègrement dépassé les 40 °.
La sécheresse est l’autre pendant de l’augmentation des températures. Un manque d’eau qui pose de sérieux problème à l’agriculture et met en péril les réserves souterraines, ponctionnées en été mais qui ont de plus en plus de mal à se remplir le reste de l’année.
Au final, selon Stéphane Hallegatte, économiste et ingénieur à Météo-France, « on estime à 70 000 le nombre de décès supplémentaires en Europe imputable à l’épisode de canicule d'août 2003. Et son coût économique est estimé à 13 milliards d’euros. »D’un point de vue économique en revanche, le très beau temps en été peut être favorable à certains secteurs. On pense bien évidemment aux fabricants de piscine dont les ventes ont explosé depuis quelques années, aux vendeurs de climatiseurs (en été 2003, tous les magasins étaient en rupture de stocks)…

Francebourse.com – Alexandra Voinchet
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