Turquie : fin de son incursion en Irak, menace d'un retour

La vaste offensive de l'armée turque visant les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans le nord de Irak s'est achevée et les unités qui y étaient engagées ont regagné vendredi leurs bases, a annoncé l'état-major turc, menaçant d'y retourner le cas échéant.
« Il a été conclu que l'opération a atteint ses objectifs et nos troupes ont regagné leurs bases dans le pays (...) le 29 février au matin », souligne un communiqué mis en ligne par l'état-major.
Le document souligne qu'au moins 240 rebelles du PKK ont été abattus en huit jours d'offensive. Vingt-sept membres des forces de sécurité turques ont trouvé la mort, selon ce décompte.
L'armée turque menace en outre de retourner en Irak pour combattre de nouveau le PKK.
« Les activités des terroristes dans le nord de l'Irak seront suivies de près et aucune menace depuis ce territoire contre la Turquie ne sera tolérée », précise le texte qui dit : « La lutte antiterroriste dans le pays et à l'étranger sera poursuivie avec détermination ».
L'armée affirme par ailleurs que les appels américains pour un retrait rapide n'ont pas influencé sa décision de quitter la zone, administrée par les Kurdes d'Irak.
« Le déclenchement et la fin de l'opération ont été entièrement déterminées par nous. Il n'est pas question d'une influence intérieure ou étrangère dans la décision des forces armées », souligne le communiqué.
Jeudi, le président américain George W. Bush et son secrétaire à la Défense Robert Gates, qui s'est rendu brièvement à Ankara, avaient appelé les Turcs à quitter l'Irak « le plus vite possible ».
« Les Turcs doivent agir, agir rapidement, atteindre leur objectif et partir », a déclaré George W. Bush à Washington.
L'armée turque indique aussi que cette incursion, lancée le 21 février au soir et menée avec des milliers de commandos, « ne va pas mettre l'organisation terroriste (PKK) entièrement hors d'état de nuire », mais a montré que « la zone n'est plus un sanctuaire pour les terroristes ».
272 cibles ont été pilonnées par air et 517 autres ont été attaquées par des éléments terrestres lors de l'offensive qui visait surtout la région de Zap, où se trouvait une importante base du PKK, ajoute le document.
La Turquie estimait avant cette opération à quelque 4.000 le nombre de rebelles retranchés dans les montagnes enneigées du nord de l'Irak.
Le ministre irakien des Affaires étrangères Hoshyar Zebari avait indiqué auparavant que l'incursion turque était terminée. « La Turquie a mis fin à son opération militaire ce matin et a commencé à retirer ses troupes », a déclaré le ministre.
Les chaînes de télévision turques ont rapporté l'information d'un retrait turc vendredi matin, plusieurs heures avant le communiqué de l'armée turque, provoquant une certaine confusion en l'absence d'une confirmation officielle.
A Zakho, ville du nord de l'Irak à une trentaine de kilomètres de la frontière, un correspondant de l'AFP a fait état d'un « silence total » depuis vendredi matin dans les zones de combats.
Un photographe de l'AFP à Cukurca, petite ville stratégique turque située à quelques kilomètres de la frontière irakienne, a constaté le retour d'une mission périlleuse en plein hiver des troupes vêtues de camouflage blanc et visiblement fatiguées à bord de véhicules militaires.
Ankara s'était refusé à fixer un délai pour mettre un terme à son offensive contre le PKK, considéré comme une organisation terroriste par les Etats-Unis, la Turquie et l'Union européenne. Il mène depuis 1984 une lutte armée contre l'Etat turc qui a fait quelque 37 000 morts.
Washington, qui fournit depuis plusieurs mois des renseignements en temps réel à son allié turc de l'Otan sur les rebelles dans le nord de l'Irak, s'inquiétait de l'éventualité d'un conflit entre ses deux alliés régionaux, les Turcs et les Kurdes d'Irak, en cas d'enlisement de l'opération turque.