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Haro sur les régimes de retraite spéciaux

Article du 10/09/2007

Le gouvernement va s’attaquer aux régimes de retraite spéciaux. Il s’agit de la dernière annonce tonitruante de François Fillon. Alors que depuis quelques jours, le pouvoir se défendait de plancher sur la question pour le moins épineuse, le Premier ministre a assuré hier, sur Canal +, que la réforme sur les régimes spéciaux de retraite était « prête ».
« Cette réforme est prête (...), elle est simple à faire, il s’agit d’aligner les régimes spéciaux sur celui de la fonction publique, une mesure d’équité que tous les Français comprennent »
, a déclaré tout simplement François Fillon. Il ne manque plus que le feu vert du gouvernement.
François Fillon attend désormais « le signal du président de la République » pour entamer des négociations avec les partenaires sociaux sur ce sujet. « Quand le président choisira de déclencher cette réforme, on entamera immédiatement les négociations avec les partenaires sociaux », a-t-il poursuivi ajoutant qu’elle pouvait « être réalisée dans les prochains mois », soit par une loi, soit par un décret. Le Premier ministre a toutefois souligné qu’il n’était « pas certain qu’il y ait besoin d’un texte législatif ». « Ca ne veut pas dire pour autant qu’il n’y aura pas un débat au Parlement pour que cette réforme soit faite dans la transparence et la concertation la plus large possible », a-t-il poursuivi.
« Elle peut être réalisée dans les prochains mois si le président de la République le souhaite », a ajouté François Fillon.
Le 1er août dernier, Nicolas Sarkozy avait confirmé sa volonté de mettre fin aux régimes spéciaux de retraite en demandant au ministre du Travail, Xavier Bertrand de les « faire converger » avec les autres régimes.
Il faut dire qu’une échéance approche : Nicolas Sarkozy doit donner le coup d’envoi du « rendez-vous » de 2008 sur les retraites le 18 septembre au Sénat. Fixée par la loi Fillon de 2003, cette deuxième étape de la réforme doit être l’occasion d’acter le passage de 40 ans à 41 ans de la durée de cotisation d’ici à 2012 et de revoir l’ensemble des paramètres des régimes publics et privés si nécessaire.

Les réactions

Il va sans dire que les propos du Premier ministre ont déclenché la levée de boucliers au sein de l’opposition et parmi les syndicats mécontents qui prétextent que le gouvernement a fait fi des négociations préliminaires avant de rédiger son texte.

Patrick Devedjian, secrétaire général délégué de l’UMP (France 2) : « Les esprits ont mûri. Les Français comprennent bien que d’abord ils doivent être égaux devant la retraite ». Pas de crainte donc de grandes manifestations hostiles, estime le leader de l’UMP, pour qui « la demande d’égalité du corps social sur les questions des retraites est une demande forte ». En 1995 toutefois, le gouvernement d’Alain Juppé avait été contraint de reculer sous la pression de la rue.

François Hollande, secrétaire national du PS (Forum Radio J) : le socialiste a mis en garde le gouvernement contre toute « précipitation » et toute « brutalité » dans la mise en oeuvre de la réforme des régimes spéciaux de retraite. « Les régimes spéciaux, ce sont des régimes entreprise par entreprise, donc c’est dans les entreprises concernées (...) qu’il faut engager les négociations. Après, on verra le texte juridique qui permettra de donner la conclusion de la négociation », a-t-il dit. « Il faut absolument que la négociation soit la règle », a-t-il ajouté.
« Il a une formule qui à mon avis n’est pas forcément la bonne de dire ‘maintenant nous sommes prêts à prendre un décret ou une loi’. Non. Je crois que la bonne manière de faire, c'est ouvrir la négociation, laisser du temps aux partenaires sociaux pour conclure », a déclaré François Hollande au sujet de François Fillon.
« S’ils n’y parvenaient pas, c’est aux pouvoirs publics de reprendre effectivement l’initiative. On peut donner un délai de trois à six mois », a-t-il jugé. « Aujourd’hui, ce n’est pas un signal qui doit être donné, c’est une négociation qui doit être ouverte ».

Manuel Valls, député-maire PS d’Evry (RTL) n’est pas tout à fait de l’avis du chef de file du PS. « Il faudra aligner les régimes spéciaux sur le régime général », admet-il. « C’est une question d’abord d’équité, et puis aussi une question financière parce que nous savons que demain il y aura pour ces régimes (spéciaux, NDLR) beaucoup plus de retraités que d’actifs », a-t-il expliqué.
« Il faut privilégier la négociation, le dialogue social, il faut éviter la brutalité, sans doute privilégier d'abord une discussion par grandes entreprises », a-t-il souligné, reprenant là les mots de François Hollande.
« Il faudra se battre avec les partenaires sociaux pour préserver le système de retraites par répartition. (...) L’allongement, de la durée de la vie rend inéluctable la hausse du nombre d’années de cotisations et les régimes spéciaux doivent être alignés sur le régime général en intégrant la pénibilité des métiers », déclare-t-il aux Echos du jour.

Olivier Besancenot, chef de file de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) (LCI) : les propos du Premier ministre sont une « déclaration de guerre ». « Elle vient un petit peu plus vite que prévu car il y a des difficultés économiques qui se profilent en cascade pour le gouvernement », a expliqué le dirigeant d’extrême gauche.
Sans préjuger de la réaction des syndicats, le candidat à l’Elysée a fait remarquer que « dès qu’on touche aux acquis sociaux arrachés par nos anciens ça peut très, très rapidement se transformer en bordel dans le pays ».

Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force Ouvrière (France 2) : « Si le gouvernement veut passer en force, il faut s’attendre à des réactions, c’est évident ».

Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT : le leader syndical a mis en garde l’exécutif contre toute réforme « unilatérale » des régimes spéciaux. « Si le gouvernement souhaite procéder par décret et nous mettre devant le fait accompli comme ce fut le cas en d’autres temps », il pourrait entraîner le pays vers « des tensions » comparables aux grèves qui avaient paralysé la France en novembre et décembre 1995, a-t-il averti.

François Chérèque, CFDT : la réaction de ce syndicat « dépendra du contenu » du décret « et pas du support », a prévenu la centrale syndicale qui estime que « le problème des régimes spéciaux se réglera en dehors du problème global des retraites, au niveau des entreprises publiques ».
Le 6 septembre dernier, François Chérèque indiquait déjà que le gouvernement était en train de préparer un décret sur la réforme des régimes spéciaux de retraite, sans savoir ce « qu’il y avait dedans ».

Que sont les régimes spéciaux ?

Ces régimes d’entreprises publiques (SNCF, RATP, EDF, GDF...) et de professions particulières (marins, clercs de notaire, ou parlementaires, membres de la Comédie-Française et de l’Opéra de Paris...) permettent généralement à leurs affiliés (500 000 actifs et 1,1 million de retraités) de partir à la retraite plus tôt que les autres salariés. Les bénéficiaires de ces régimes, souvent créés pour compenser la pénibilité ou la dangerosité de certains métiers, ont des droits supérieurs à ceux des salariés relevant du régime général et des fonctionnaires : âge de cessation d’activité souvent inférieur à 60 ans et durée de cotisation généralement moindre que les 40 annuités exigées pour le régime général.
A la SNCF, les agents peuvent partir en retraite à 55 ans (50 ans pour les agents de conduite) après 25 ans de service. A EDF et GDF, l’âge de départ est fixé à 60 ans, sauf pour les salariés occupant les fonctions les plus pénibles (55 ans).
Le gouvernement n’entend pas seulement se pencher rapidement sur les régimes spéciaux. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2008 devrait être l’occasion de lancer un signal fort sur l’emploi des seniors, avec un durcissement de l’encadrement des préretraites et la limitation de la possibilité de mettre d’office à la retraite les salariés avant 65 ans.

Francebourse.com – Alexandra Voinchet, avec AFP
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