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Coup d'éclat en Bolivie : pétrole et gaz nationalisés!

Article du 03/05/2006
Le Président bolivien nationalise les hydrocarbures

Hier Evo Morales a provoqué la stupéfaction générale en envoyant l’armée occuper les champs pétroliers et gaziers bolivien. A cela s’ajoute un ultimatum à 180 jours pour les firmes étrangères. Au terme du décret signé ce lundi par Evo Morales, la compagnie nationale bolivienne YPFB contrôlera tous les champs de gaz naturel et paiera les compagnies étrangères pour leurs services. Coup de force et changement de stratégie. Le leader bolivien vient de rejoindre l’Alba s’inscrivant ainsi dans la politique d’Hugo Chavez. Selon les spécialistes, ce coup d’éclat aura un impact minime sur les marchés en comparaison du dossier iranien.
L’armée au service de l’énergie. «Nous demandons aux forces armées, ainsi qu'à des bataillons d'ingénieurs, d'occuper dès maintenant tous les gisements». C’est ce qu’a déclaré hier, à la surprise de tous, le président bolivien Evo Morales au retour d’un week-end à La Havane passé avec Fidel Castro et Hugo Chavez

Selon le Figaro, l'armée qui avait reçu pour ordre d’occuper les 53 installations pétrolières et gazières du pays, a obtempéré tout en définissant la décision présidentielle de « nationalisation intelligente». »

A l’occasion d’une cérémonie qui se déroulait dans le sud du pays à Carapari, Evo Morales a annoncé « la prise de contrôle de l’ensemble de ces champs par la compagnie publique nationale YPFB » alors que le secteur énergétique bolivien était placé jusqu’ici sous la coupe des groupes étrangers.

Ultimatum à la clé.

Avec quelques 48,8 trillions de pieds cube de gaz naturel, la Bolivie détient la deuxième plus importante réserve d'Amérique du sud derrière le Vénézuela.
Evo Morales a donné un délai de 180 jours aux 26 compagnies étrangères implantées en Bolivie, dont Total (France), Petrobras (Brésil), Repsol (Espagne), ExxonMobil (USA) pour signer de nouveaux contrats d’exploitations inscrits, sous le signe (de source gouvernementale) «de l'équité et de la justice».

Loin des micros, «certains dirigeants des compagnies étrangères reconnaissent que cette équité a trop longtemps été absente des contrats boliviens. » (Le Figaro) puisque les habitants concernés au premier chef n’ont jamais été concerné par les bénéfices issus de l'exploitation des ressources naturelles (mines hier, hydrocarbures aujourd'hui).

Dominée par l’appétit énergétique sans limites du Brésil et l'Argentine, la Bolivie ne pouvait que constater l’intérêt de ces deux pays qui s'approvisionnaient jusqu’ici en gaz à prix cassé et sans supplément d’âme, grâce au partage inégal des ressources extraites du pays le plus pauvre d'Amérique du Sud. 74 % de la population, principalement indigène, y vit en dessous du seuil de pauvreté
Depuis trois ans, ce dossier met le feu aux poudres. Le débat brûlant a déjà provoqué la chute de deux présidents boliviens à l’image de Carlos Mesa qui s’est vu obligé de démissionner le 6 juin 20005 et avant lui Gonzalo Sánchez de Lozada le 17 octobre 2003.
Une nationalisation prévue de longue date
Elu à 52% au premier tour le 18 décembre 2005, Evo Morales est le premier Indien, à accéder au pouvoir. Son arrivée hautement symbolique symbolisait un espoir de changement si longtemps attendu.
Il prônait déjà la remise en cause du « modèle néolibéral » et de l’« Etat colonial » avec entre autres la nationalisation des hydrocarbures. Le président a toujours affirmé que les firmes pourraient continuer leur exploitation en Bolivie « dans le cadre d’une politique de « nationalisation sans expropriation ». (Le Monde diplomatique)

Le président avait également précisé (toujours selon le Monde Diplomatique) que « son gouvernement révisera tous les contrats (souvent signés en marge de la loi), augmentera taxes et royalties, reprendra la propriété des gisements, et contrôlera 50% de la production. »

L’année dernière le gouvernement de la Paz avait fait voté par le Congrès de la Paz, « une loi ajoutant aux 18 % de royalties sur les champs pétrolifères et gaziers une taxe sur la production de 32 % » (La Tribune)


Un leader charismatique

Cent jours seulement depuis son accession au pouvoir, Evo Morales n’est pas sans savoir qu’il doit faire face à une vague de mouvements sociaux cristallisant le cri de plus de 500 ans d'exploitation des Indiens par ceux qui dirigent la politique et l’économie.

Le chef d'Etat bolivien a ainsi suivi l’exemple du président vénézuélien Hugo Chavez qui a « imposé plus que négocié une transformation des contrats avec les multinationales étrangères contraintes d'accepter ses propositions avant le 31 mars dernier, ou d'abandonner certains de leurs champs. » (XINHUA)

A l’exception d’ExxonMobil, toutes les firmes s’y sont pliées tant bien que mal, convaincues par les nouveaux records historiques des cours du pétrole (plus de 70 dollars le baril).

Mais si la Bolivie détient le second plus grand gisement de gaz du continent, elle ne partage pas dans le même rapport de force que le Vénézuela. « Ses capacités financières inexistantes et l'absence de savoir-faire la font dépendre des entreprises étrangères. Surtout, Evo Morales prend le risque de braquer le Brésil, dont les entreprises contrôlent un bon tiers de l'activité du pays, dans les hydrocarbures, l'agriculture ou les mines. » (Monde diplomatique)

L’Alternative bolivarienne pour les Amériques

Bien qu’Evo Morales avait affirmé gouverner librement sans suivre de mentor, il s’inscrit dans le sillage d’Hugo Chavez. Une démarche qui peut se comprendre partiellement par le détachement du Brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, à six mois de l'élection présidentielle.
Dès lundi, l’actuel ministre brésilien des Mines et de l'Energie, Silas Rondeau a déclaré « La nationalisation de l'industrie gazière et pétrolière bolivienne est une action "hostile". Tout comme Jose Sergio Gabielli, président de la compagnie pétrolière d'Etat brésilienne Petrobras qui détient 14,5% des réserves de gaz de la Bolivie (XINHUA)
« Ce week-end, à La Havane, Evo Morales a décidé de faire de son pays le troisième membre de l'Alternative bolivarienne pour les Amériques (Alba), un projet régional d'intégration économique et politique dont la dynamique dépend exclusivement des pétrodollars d'Hugo Chavez. » (Le Figaro)

La réaction des marchés

Suite à cette annonce « le baril de brut léger a rebondi à 73,8$ » (Cercle finance) Le baril de brent a pris 1,52 dollar à 73,40 dollars tandis que le light sweet crude américain gagnait 1,52 dollar à 73,40. Dans cette hausse, il ne faut pas négliger l’impact de la crise iranienne ajouté à l’incendie d’une raffinerie sicilienne qui a suscité de vives inquiétudes.

Selon un analyste d’Oppengeimer, « la production pétrolière bolivienne « reste assez peu importante » (La Tribune). Aujourd’hui, Wall-Street qui a ouvert en hausse bénéficie du prix élevé de l'énergie et des matières premières favorisant les valeurs minières et pétrolières, comme ExxonMobil en hausse de 0,84% à 63,95. (Reuters). Le principal 'client' de la Bolivie (Petrobras) puis Repsol a reculé de 1,2%.

Quant au gaz naturel, il a pris un peu plus de 1 cent à 6,66 dollars par BTU sur la place new-yorkaise.

Aurélie Noailly

Source :

La Bolivie nationalise ses champs d’hydrocarbures, La Tribune du 2 mai 2006, p10
La Bolivie indienne rejoint la gauche latina, Le monde diplomatique le 22 /12/ 2005, Maurice Lemoine
Evo Morales nationalise les hydrocarbures en Bolivie, le Figaro du 2 mai 2006,Lamia Oualalou ,Rubrique International
Dépêche de XINHUA, le 1er mai
Dépêche du 2 mai d’AFP, de Cercle Finance et de Reuters
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